Si nombre de technologies du web, comme avant elles, celles des télécoms ont été inventées en Europe, elles ont principalement été développées et commercialisées par la Silicon Valley. Devenue vulnérable à cause d’une politique de sous-investissement en matière de sécurisation de ses infrastructures (data centers, câbles, réseaux satellites, extra atmosphère) l’Europe a probablement perdu sa souveraineté.
Dans le « Parcours » que nous lui consacrions en juillet 2020, Jean-Paul Stahl, professeur émérite de maladies infectieuses et tropicales au CHU Grenoble-Alpes soulignait l’interférence des données géopolitiques sur celles de la santé, notamment par rapport au Brexit et témoignait de la valeur stratégique des vaccins sur l’échiquier mondial. Trois ans plus tard, à l’heure où les combats font rage en Ukraine, le cyberespace est un théâtre d’opération où l’usage des données est une arme de lutte informationnelle.
Au centre du conflit idéologique qui oppose les partisans d’un monde libre, ouvert et démocratique à ceux d’un monde fermé, autoritaire et dictatorial, la gouvernance des données est devenue un sujet sensible. Acteurs de la militarisation et de la fragmentation d’Internet, phénomène qui risque probablement de s’intensifier dans les années à venir, certains pays comme la Chine, la Russie, l’Inde, l’Iran, la Corée du Nord ou des états d’Afrique n’hésitent pas à couper l’accès aux réseaux.
Face à cette guerre sans limite, la France et l’Europe ont-elles les moyens de riposter ?
Lancée la semaine dernière, par les ministres François Braun et Jean-Christophe Combe, la nouvelle feuille de route du numérique en santé 2023-2027 comporte 18 priorités. La 15e qui consiste à « renforcer massivement la cybersécurité dans les établissements, notre souveraineté sur l’hébergement et notre résilience face aux futures crises sanitaires » contribuera-t-elle à maintenir notre influence sur la scène internationale ?
Didier Ambroise
Associé fondateur Doshas Consulting